Bit-makers - avec Marta Gentilucci

Bit-makers vol. 2 est la seconde série de rencontres abordant la recherche artistique du point de vue des créatrices. Le titre de la série est un clin d'oeil au "beat-makers", producteurs de musique actuelle. La plupart des artistes rencontrées élaborent elles-mêmes leurs propres outils de création, sous la forme de programmes informatiques produisant des "bits".

PORTRAIT BINAIRE

INTERVIEW

INTERVIEW COMPLÈTE

Vous êtes compositrice-chercheuse. Est-ce un double métier ? En quoi consiste-il ?

Je pense que le métier de compositeur et de chercheur est le même. Ici, à l’Ircam, le mot “chercheur” est associé à des compétences scientifiques ou techniques extrêmement élevées. Cependant, je n’ai pas de formation scientifique. Dans le cursus que j’ai suivi ici, et grâce aux enseignements que j’ai reçues, j’ai acquis et modifié des outils que je connaissais déjà.

Mon travail de recherche est en réalité un travail de recherche musicale. Cette recherche nécessite la maîtrise de certains outils, mais surtout la nécessité d'avoir un contexte scientifique pour s'améliorer. Pour être plus précise, ma résidence ici portait sur la voix chantée, un domaine qui m’intéresse depuis toujours. Cet intérêt a pu être nourri par la connaissance incroyable des équipes Analyse-Synthèse, CREAM et Représentations Musicales.

La recherche (et là je parle de mon rôle de “chercheuse”), c’est la capacité de faire cette connexion entre ce qui relève du domaine scientifique et ce qui est de l’ordre du musical. Et également, la communication avec les scientifiques de mes besoins musicaux. C’est donc faire le lien entre mon univers et un univers qui m’est plus éloigné. Cela permet d’importer dans ma musique des éléments qui seraient impossibles à mettre en oeuvre sans la science.

Cela suppose aussi d’accepter les limites de la recherche scientifique. On ne peut pas tout avoir tout de suite ; il y a un parcours passionnant, parfois très lent, parfois rapide. Les résultats peuvent se faire attendre comme arriver immédiatement… La découverte de cet univers, au cours de ces années à l’Ircam a vraiment été passionnante. C’était comme un Noël permanent ! Toute cette richesse ce sont comme autant de cadeaux, et l’émotion de les découvrir est très forte !

Finalement pouvoir comprendre des choses dont on ne s’approchait que par intuition est gratifiant, d’autant qu’il s’agit de connaissances pointues et difficilement accessibles autrement.

C’est donc en un sens un travail d’accompagnement, qui vous aurait ouvert des portes musicales ?

Oui cela me permet d’avancer musicalement. Mais acquérir ces connaissances m’aide aussi à construire des questions. La recherche, c’est se questionner en permanence. C’est cette impossibilité de donner des réponses définitives mais plutôt l'invitation à continuer à se poser des questions.

Pour moi c’est la partie la plus profonde. C’est dans ma nature de poser des questions, et de me poser des questions.

Vous vous intéressez donc davantage à poser ces questions qu'à y répondre ?

Evidemment, il y a un plaisir très fort à trouver des réponses ! Si l’on ne trouvait jamais de réponses, il serait sans doute difficile de continuer à se questionner !

En revanche, je vois clairement qu’une question n’est jamais définitive, mais toujours temporaire et transitoire. Et le plaisir vient du cheminement, du fait que les découvertes se font par étapes.


Dans ce cheminement, une idée en amène-t-elle un autre, ou le questionnement est-il étagé, dirigé vers un but ?

Les deux trajectoires coexistent, ce n’est donc pas facile de répondre à la question. Mais je choisirais plutôt la seconde option. Une trajectoire est souvent dessinée par une intuition : on veut aller dans une direction, et le trajet se fait par des questionnements qui vont de plus en plus approfondir le sujet. Mais c’est aussi se laisser la possibilité de faire des détours, d’avoir une articulation plus complexe.

La question de la vocalité, de la perception physique du son, m’a toujours accompagnée. Et il m’était difficile de l’articuler, de comprendre pourquoi j’étais attirée par certains types de sons, certains types de méthodes de composition. Petit à petit j’ai compris la liaison entre mon background initial et le type d’écriture qui s’est développé en moi.

Ce sont donc la recherche pure et l’analyse qui vous ont permis de comprendre cela ?

Non, je pense qu'il s’agit davantage du fruit de la pratique musicale. J’ai un besoin de faire. Je suis une personne très abstraite, et rationnelle je crois, et il m’est facile de me perdre dans mes propres pensées… Donc ma façon de concrétiser, d’avancer, c’est faire.

L’acte d’écrire, de rechercher, de travailler surtout avec les instrumentistes c’est mon moyen ultime de découverte. Je n’essaie pas de vérifier une abstraction ; le questionnement, la compréhension se font par le faire.

Les questions que vous vous posez dans votre recherche sont-elles liées aux questions de composition ? Ces deux questionnements sont-ils du même ressort ?

Oui, il y a des aller-retours en permanence.

Il n’y a jamais de question technique en soi. Je ne me pose pas la question par exemple du tracking d’une fondamentale dans une fréquence. La question que je me poserai serait : j’ai une idée musicale, comment la réaliser, quels sont les moyens pour y arriver ? Je dois formuler cette idée, et c’est l’expérience qui me permet d’y parvenir ; je m’appuie sur les étapes par lesquelles je suis passée, y compris avec mes autres pièces et mes recherches précédentes.

Lorsque je compose, il y a le moment où je me sens attirée par une idée, un son ou des sons, qui sont parfois relativement complexes. Mais ensuite ce sont des mois de travail, et tout un parcours d’écriture qui sont nécessaire pour s'en approcher ! Cela nécessite un travail concret avec les instrumentistes, qui passe par des esquisses. Et parfois aussi par des moments de silence.

On a besoin de silence pour faire de l’espace. Comme en musique : si l’espace est rempli en permanence, on n’a plus de place pour percevoir les détails. Ce besoin de silence est une donnée classique en musique, mais je crois qu’il est tout aussi important dans la réflexion. Il faut arriver à l’accepter. Ce silence est comme une absence, où l’on sait que l’esprit est en train de travailler, de métaboliser tous les inputs, les questions et le travail déjà fourni.

Votre musique semble d’ailleurs donner une place importante au silence et à l’espace.

Oui, je crois qu’il y a un espace physique du son. On ne peut pas être toujours dans l'"intention", on ne peut pas être toujours plein d’énergie, ni heureux. Il existe un conflit entre les attentes, les besoins, les désirs et la nécessité de respecter le temps physiologique.

Si je dois écrire une pièce de trente minutes, je dois vivre avec la frustration de n’avoir écrit que trente secondes ! Et de savoir qu’avant d’arriver à la fin il y aura des mois et des mois de travail.

À une autre échelle, il existe aussi une intensité à chercher, quelles seront les cinq prochaines secondes ? Et de zéro à trente, il y a tout un parcours qui dure parfois des jours pour arriver à écrire ce que l’on avait pressenti, sans perdre de vue son horizon, c’est à dire les trente minutes. Il y a une dimension spatiale centrale dans la sensation temporelle.

Justement, est-ce difficile pour vous de ne pas perdre de vue votre horizon, de ne pas vous laisser noyer par le temps nécessaire à l’écriture ?

Je dirais que non, même si je pourrais peut-être me contredire dans quelques années. Pour l’instant, le besoin d’aller où je le souhaite est tellement fort que mon horizon semble stable. C’est plutôt mon impatience que je dois combattre !

L’une des difficultés de mon travail est de savoir que la pièce ne deviendra pas une déviration de la théorie. Elle part d’une expérience sonore. J’ai une forte intuition de la relation entre un son, un agglomérat sonore et ce que sera la pièce. Mais trouver les moyens, trouver la trajectoire ou l’énergie pour y arriver, ça c’est extrêmement difficile. Et c’est là que réside véritablement le travail et la patience du compositeur.

Avoir un besoin très fort d’aller où vous voulez crée-t-il une cohérence dans vos pièces ? Cela fait-il ressortir des points communs entre elles ?

Je crois que oui, et je me sens vraiment chanceuse de pouvoir réaliser mes projets de recherche ici à l’Ircam. Le son est une vibration, cette vibration se reflète dans le corps, et ce phénomène est un trait d’union de tout ce que je fais.

Au début de mes recherches, j’ai passé des heures, toute seule ou avec les instrumentistes à écouter des notes, de percussion, de violon, l’oreille très proche, à essayer de découvrir sous la même note la myriade de possibilités et de nuances qui s’offrait, au-delà du simple paramètre de la hauteur. Cela a constitué une grande partie de mon travail avec les instrumentistes, le fait d’aller chercher toutes les possibilités de ces sons qui, dans l’absolu, ne seraient qu’une note.

L’un de vos objectifs serait de vous affranchir de la note pour lui rendre son caractère purement vibratoire ?

Une note est une note, mais c’est avant tout une vibration, une couleur, une intensité. Jamais l’expression d’un sentiment. Il est vrai que je suis issue de cette tradition ; le fait d’avoir étudié en Allemagne a sans doute contribué à m’éloigner de l’aspect “sentiment”. Mais cela n’a jamais été ma démarche. Le risque était plutôt celui d’une dérive philosophique. J’ai été exposée à cette culture où la démarche des compositeurs étaient très teintée de réflexion intellectuelle, sociale, philosophique, avec cette passion pour la parole aussi.

Et en même temps j’avais une forte attraction pour le son, pour la matière. Et cette friction existe en moi depuis le début. J’ai commencé mes études en tant que chanteuse, où l’aspect physique et le son sont primordiales. Mais je faisais en parallèle mes études de littérature, et cela m’a conduit à la composition et à la réflexion esthétique.

Et puis à un moment il y a comme un déclic, comme une certitude qu’il existe une priorité. Et ma priorité c’était cette fascination pour le son. Aujourd’hui encore, c’est là où je trouve mon plaisir. On sait que le travail peut être teinté de fatigue, de frustration, de combats, de tensions mais il y a ce moment de plaisir qui n’est pas la performance de la pièce : c’est la découverte d’un son. Là on se dit “ah, j’ai une idée, j’ai compris” et c’est ce moment qui est pour moi le plaisir ultime d’être compositrice.


Davantage encore que le moment où la pièce est jouée ?

Oui sans aucun doute. Parce que c’est la découverte d’un son, parce que c’est une émotion qui est très forte. C’est le moment ou s’ouvrent la ou les possibilité.s. Et cela déclenche la nécessité d’aller chercher la suite. Je crois que je n’avais jamais verbalisé de manière si claire l’importance du moment de la découverte.

Diriez-vous que cette approche physique du son, que le fait d’en faire l’expérience est votre principale source d’inspiration ?

Oui cela part de cette expérience avec les instrumentistes. Mais cela vient aussi de l’extérieur, ou de l’intérieur, avec moi même, avec ma voix.

Ce qui m’inspire également c’est cette possibilité de faire des connexions. C’est à dire qu’un son isolé, singulier, devient tout à coup extrêmement riche, et porteur d’un énorme potentiel d’être lié à d’autres choses. C’est ce qui en fait le moment le plus excitant.

Comment faites vous ces connexions ? Est-ce un travail d’imagination, ou cela se fait il dans le concret, toujours dans l’expérimentation physique ou à l’ordinateur ?

Une grande partie du plaisir que j’éprouve dans ce processus c’est qu’à partir d’un son réel j’entends d’autres sons dans ma tête. Une connexion se fait, qui le prolonge. Je n’en connais pas les aspects scientifiques mais il y a quelque que chose de très réel dans cette connexion. Elle est produite par un son physique ou un événement extérieur et crée en moi comme une forme, une sorte de perle, qui apparaît et qui grandit.

Mais ce n’est là que le début, car des questions se posent après la découverte et l’imagination d’un début d'univers sonore : quel type d’énergie se déploie dans cet univers, quelle est la trajectoire ? Et là commence la partie également passionnante de la construction, de l’architecture… de la vie de l’extension de ce son.

Par quoi commencez-vous le travail de composition ?

Lorsque j’ai une commande, je prends un temps assez long d’écoute, de réflexion. J’essaie d’ouvrir mes oreilles et mes yeux totalement sur l’extérieur. J’essaie aussi de m’ouvrir à des sujets théoriques, par exemple de m’interroger sur ma relation avec la mélodie ou l’ornementation vocale.

Ou bien, je sais que tel musicien interviendra, tel soprano, tel ensemble vocal,  tel instrumentiste… Alors ma première pensée est d’essayer de comprendre le son de cet instrumentiste, et quel est son rapport à son instrument. Quels sont ses préférences ? C’est comme avoir un invité à la maison, on va lui demander quel est son plat préféré. Ensuite il y a ma façon de cuisiner, mais cette écoute, cet échange en amont sont primordiales.

Parfois les choses sont très ouvertes et c’est d’une stimulation extérieure ou d’un son que je pars. Indépendamment de ces deux possibilités, je passe toujours par un moment de projection où, à partir de cette intuition ou de cette expérience sonore, j’essaie d’imaginer où je veux arriver, si je peux y arriver et comment. C’est là que se pose aussi, et surtout, la question du temps. J’ai souvent une idée assez précise de la durée que je veux pour ma pièce. Et le résultat est rarement différent de mon imagination de départ. Parce que je construis sur cette durée.

Encore une fois c’est comme en cuisine : on a sur le doigt la quantité de sel nécessaire et sait combien de temps il faut faire mijoter la sauce pour la réussir. C’est donc une question d’expérience. C’est pour cela que je disais précédemment. Que mon amour de la composition est celui du faire. On ne peux pas théoriser la cuisine, il faut la faire ; il faut aussi rater et brûler des plats ! C’est la même chose ici.

La voix semble être une composante importante dans votre oeuvre, sauriez vous dire pourquoi ?

Je pense que la voix a toujours été mon instrument de prédilection. Je viens d’une famille de non-musiciens mais où la musique a toujours été importante, comme une part de nous-mêmes. Pas seulement la musique classique. Je pense à nos trajets en voiture… On chantait beaucoup, mon papa faisait la seconde voix, moi je faisais toujours la soprano. Et il y avait ma maman avec sa voix grave et très forte mais elle n’arrivait jamais à prendre une note, c’était toujours à côté. Cela faisait toujours dérailler les chansons, et… peut-être que c’est de sa faute si j’aime la musique contemporaine, je ne sais pas ! (Rires)

J’ai toujours chanté, j’étais dans le petit choeur de l’école à six ans. Sur le moment on ne se rend pas vraiment compte, on est dans l’instant. Mais quand on me demande à propos d’une pièce “ça vient d’où, ça ?” Je réfléchis et je dois répondre immanquablement : ça a toujours été là.

Ce n’est donc pas un hasard si j’ai commencé mes études comme soprano. Avec toujours cette dichotomie, ou cette complémentarité, entre la réflexion et la pratique. Finalement je pense que la composition est le lieu où ces éléments ont fusionnés, ou ce besoin de choisir disparaît. Parce qu’on a besoin des deux.

Les gestes vocaux que l'on entend dans vos oeuvres, viennent-ils de vous-même directement ? Vous les vocalisez, vous les chantez ?

Oui, je les chante ! Alors, sans doute pas comme ils devraient l’être ! Des collègues me disent que l’on voit que j’ai été chanteuse, mais je ressens l’écart avec les interprètes. Ces vocalises, ces gestes vocaux, je pense qu’ils font partie de ma pratique de recherche. Et ils s’accompagnent du travail avec les chanteurs.

Une chose qui m’intéresse beaucoup c’est le lien entre le geste vocal, la tradition vocale (du Bel Canto, du Baroque) et le futur. En quoi ma contribution ajoute à ce que l’on a déjà, en quoi le nourrit-elle ?

Je questionne aussi ma relation au texte. On m’a déjà interrogé sur cette relation autour de ma dernière pièce, et en regardant en arrière je m’aperçois que j’ai avant tout besoin d’une négation du sens. Je n’écris jamais sans texte, mais le texte est toujours décomposé. L’ornementation par exemple est une possibilité pour moi de nier le sens d’un texte. C’est une possibilité de créer une extension, une déviation…

Vous voulez vous affranchir du texte ?

En partie. C’est l’une des possibilités techniques. Il y a aussi bien sûr la question du registre. Savoir que si un Soprano chante certains types des mots ou de consonnes, ils seront plus ou moins intelligibles selon le registre. Mes connaissances vocales me sont ici très utiles ! J’ai donc toute une stratégie pour découper et élaborer les textes.

Je suis plus tournée à présent sur les questions de la trajectoire, de l’énergie. La trajectoire, c’est le mot qui convient le mieux ici : quelle est la trajectoire de la voix, dans un temps donné. Et comment cet espace, cet espace-temps est articulé. Quant à l’ornementation, elle fait partie de la tradition vocale et c’est un aspect auquel j’ai senti la nécessité de me confronter.

J’ai le sentiment que cette palette de possibilités s’est étendue avec le temps. Y compris pour des pièces pour voix et ensemble instrumental ; je pense que ma palette de couleurs et d’articulations de la voix s’est élargie.

Y a-t-il chez vous un lien privilégié entre voix et sons électroniques ?

Oui. L’année de recherche que j’ai passée ici, à l’Ircam, a beaucoup éclairé tout ce travail sur le geste, la vocalité et tout ce que j’ai évoqué à propos de la vibration du son. J’ai présenté un projet sur le vibrato de la voix chantée et la distorsion et cela a contribué à clarifier ce qui allait être pour moi un point de convergence entre la voix, la vibration, le corps et l’électronique.

De même que les aspects théoriques et physiques sont complémentaires, les domaines acoustiques et électroniques sont puissamment liés. Ils revêtent des formes différentes mais sont de même nature. C’est parfois seulement à l’aide d’une Loop et d’autres manipulations que je trouve la vibration que je cherche dans la voix. La voix a des limites physiques très claires que l’ordinateur me permet de dépasser. Bien que l’ordinateur lui-même ai d’autres limites…

Le projet de recherche dont vous parliez vous sert-il seulement dans votre travail de compositrice ou a t-il d’autres débouchés (logiciels, plugins du forum…)?

L’Ircam a une tradition de partage des connaissances : votre recherche vous appartient, mais elle est toujours utile aux autres, elle leur reste ouverte. Dans mon cas spécifique et mon travail sur le vibrato de la voix chantée, l’idée était de contribuer à élargir les possibilités que nous avions à notre disposition.

L’équipe Analyse-Synthèse travaillait sur Isis, un logiciel de synthèse de voix et l’un de leur questionnement portait sur le fait d’approfondir l’aspect vibratoire. Comment créer la vibration naturelle de la voix. Et cela a rejoint le travail que je faisais, qui portait sur des voix chantées, et non synthétisées.

La recherche a abouti à la possibilité de recréer et de manipuler ce vibrato, à partir d’enregistrements réels, et donc de le composer, avec des paramètres de temps, d’intensité, de rythmique etc. Et de l’appliquer à une voix non vibrée. Nous avons donc la possibilité de passer outre les limitations physiques d’une voix, de pouvoir par exemple changer sa vitesse de vibration sans qu’elle soit limitée par son registre par exemple.

Dans le cadre de mon projet actuel qui doit aboutir à une pièce, nous travaillons à la possibilité de recréer ce processus en temps réel. C’est à dire superposer à la voix du chanteur sa propre voix, manipulée de manière à lui donner un vibrato qui, dans d'autres circonstances, ne serait pas possible. Un vibrato extrême, ou qui change de vitesse…

J’ai également travaillé sur la distorsion. L’intérêt que j’ai porté à cette question nous a permis, avec l’équipe, de développer Angus, un petit logiciel disponible sur le Forum. Je n’avais pas de pièce à écrire à ce moment là, c’était donc une période de recherche, que je peux désormais exploiter dans la composition. Comme s’il s’agissait d’une esquisse que l’on concrétise par la suite.

J’ai pu écrire un article qui portait sur le fonctionnement de ce processus ; on reste donc dans l’idée de partage de connaissances scientifiques. J’ai pu contribuer à cette recherche de par mes connaissances pratiques, concrètes de la voix, loin d’une théorisation, et cela a beaucoup intéressé l’équipe Analyse-Synthèse.

Propos recueillis par François Vey.